Depuis les débuts de l’automobile, la voiture de sport a toujours eu une place de choix dans le cœur des passionnés. La raison est probablement liée au fait qu’elle représentait le lien direct avec la course automobile et ses bolides pilotés par des gentlemen drivers, tels des héros des temps modernes. Mais les temps ont changé et l’on est en droit de se poser la question de la légitimé et du sens que ces véhicules ont encore aujourd’hui, voire de leur existence pour demain !
La course automobile faisait vendre à une époque pas si lointaine où la publicité et le marketing n’en étaient qu’à leur balbutiements… Cela se traduisait par la maxime « Win on Sunday, sell on Monday » ! S’il est indiscutable qu’au siècle dernier l’impact de la course automobile se répercutait directement sur les ventes des voitures particulières, ce phénomène s’est atténué au fil du temps. Pourtant, des études montrent que ce lien perdure indirectement via la vente des voitures de sport dont les propriétaires passionnés continueraient d’influencer l’acheteur lambda par la simple vue de leurs bolides en circulation sur la route. Donc, oui, la voiture de sport fait toujours rêver et, en cela, elle continue de participer au succès d’une marque. Mais est-ce que ce phénomène centenaire ne risque-t-il pas de changer avec l’avènement de la voiture électrique qui s’invite aussi bien sur nos routes que sur les circuits ?
Des émotions plein le corps !
Pour répondre à cette question, il est important de comprendre ce qui fascine les foules aux abords d’un circuit automobile. Quand il arrive dans l’enceinte d’un circuit, le spectateur est soumis à une succession de chocs émotionnels qu’il ne vit nulle part ailleurs et qu’il assimile à tout jamais au sport automobile, à la voiture de course et, par-là, à la voiture de sport. La première de ces émotions est indéniablement le son émis par les bolides qui filent à grande vitesse sur la piste. Ce son est l’association complexe des bruits du moteur, des échappements, du crissement des pneus et finalement, de l’onde de pression générée par l’air fendu à haute vitesse par ces bolides. Viennent ensuite les odeurs émanant des voitures de courses qui peuvent être aussi diverses que la gomme brûlante des pneus, les gaz d’échappement, l’essence s’évaporant des réservoirs ou l’huile suintant des carters moteurs. Au même titre que le son d’un moteur permet aux experts d’identifier le nombre de cylindres, ces derniers peuvent aussi déceler, à travers les odeurs, le type de moteur (essence ou diesel, 2 temps ou 4 temps, avec ou sans catalyseur, etc.). Finalement arrive l’émotion visuelle qui fait la synthèse de toutes ces sensations en les figeant dans l’image des voitures déboulant sous nos yeux à toute vitesse.
De la course à la route
Vous l’aurez compris, les constructeurs automobiles ont bâti leur image de marque en transposant ces ingrédients de la course à la voiture de sport pour faire rêver leurs clients. Les plus chanceux, tels des pilotes, peuvent revivre ces frissons au volant de leur monture, tandis que les badauds se contentent de les percevoir en les voyant passer ! Ceci nous fait dire que l’existence de la voiture de sport se justifie à travers son mimétisme de la voiture de course, chose particulièrement flagrante dans les années 1960-1990 lorsque les voitures de rallye s’inspiraient des modèles routiers. Tout le monde se souvient des iconiques Porsche 911, Alpine A110, Audi Quattro, Lancia Integrale ou Subaru Impreza… La liste serait d’autant plus longue si on la déclinait aux autres disciplines mais, clairement, toutes partagent un look, un son, des vibrations… la passion !
Aujourd’hui…
Au fil des ans, la technologie n’a eu de cesse d’évoluer en apportant son lot d’innovations tout en profitant aux performances. D’ailleurs l’évolution technologique est telle que les voitures modernes atteignent aujourd’hui des niveaux d’accélération et de vitesse inconcevables il y a peu. Pour l’illustrer, réalisons que, les mouvements écolo faisant pression, les constructeurs ont adopté un « gentlemen agreement » limitant la vitesse à 250 km/h ! Si aujourd’hui la moindre « GTI » a un niveau de performances équivalent, ou même supérieur, aux voitures de sport des années 1990, les voitures de sports actuelles ont tout bonnement percé le plafond avec des accélérations ahurissantes comme le 0-100 km/h en moins de 3 secondes de la Porsche 911 turbo. Mais cette démesure n’est désormais contrôlable qu’à travers l’électronique et les logiciels informatiques capables de gérer traction, freinage, direction et trajectoire… Pire, les normes édictées par les politiques contribuent à dénaturer davantage les sensations de la conduite automobile à travers des limites d’émissions sonores ou des systèmes d’aide à la conduite. Bref, la voiture devenue toute puissante est aussi muette que castratrice en assistant son conducteur à tel point que ce dernier n’a presque plus aucun mérite à son volant !
Et demain ?
En ajoutant à tout cela les dernières tendances technologiques que sont le passage au moteur électrique et à la conduite semi-autonome (en attendant l’autonomie 100% des robot-taxis), on se demande si la voiture de sport désormais aphone et inodore a encore un goût, une place ou un sens dans une société où tout doit être propre et politiquement correct. Bien sûr, les voitures de sport électriques sont déjà là et avec des performances toujours plus folles – Tesla nous promet le 0-100 km/h en moins de 2,0 s aves son futur Roadster – mais où est l’intérêt dès lors que les émotions ne sont plus au rendez-vous et que la vitesse est de plus en plus limitée ? Tout cela nous pousse à conclure que l’avenir de la voiture de sport c’est de préserver les derniers beaux exemplaires, dont l’ivresse de la connexion homme-machine nous a fait vibrer, pour continuer de vivre ces émotions qui appartiennent désormais au passé… Cette conclusion se matérialise déjà avec la tendance du « Retromod » traités dans ce numéro, un phénomène qui prendra probablement de l’ampleur dans les années à venir et contribuera à l’explosion la cote des anciennes voitures de sport. Un conseil, gardez bien votre ancienne ou procurez-vous-en une tant qu’il en est encore temps !
L’avenir de la voiture de sport c’est peut-être de préserver les derniers beaux exemplaires…