Rouler au quotidien avec sa old/youngtimer est quasiment devenu mission impossible dans la plupart des grandes villes européennes qui interdisent leur accès aux voitures polluantes. La parade s’appelle Retrofit, une technique qui convertit en électrique une ancienne voiture thermique. C’est dans ce contexte que nous avons testé une étonnante Mercedes 450 SLC de 1977 convertie à la fée électricité.
L’idée de convertir une voiture thermique à la propulsion électrique n’est pas nouvelle mais, avec l’accélération du développement des voitures électriques, cette tendance s’est définitivement mise en marche. La technologie du Retrofit, désormais aboutie et accessible, attire de nombreuses start-up comme Emobe qui a réalisé la Mercedes 450 SLCE de notre essai. Créée par deux ingénieurs passionnés d’automobile, Emobe s’est spécialisée dans la conversion des voitures thermiques anciennes en électriques, un concept dénommé EMASTERED. Ce traitement donne cette Mercedes 450 SLCE, leur première réalisation qui fait office de véhicule démonstrateur.
Le bon véhicule
Le facteur émotion est souvent le critère qui dicte le choix de sa old/youngtimer, néanmoins il convient de considérer minutieusement le véhicule à convertir car, si la plupart des voitures sont « retrofitables », certaines s’y prêtent mieux que d’autres. En effet, des points cruciaux tels l’encombrement et le poids de la mécanique existante doivent coller à ceux du nouveau groupe électrique. Par conséquent, le nouvel ensemble motopropulseur doit pouvoir entrer dans un « packaging » similaire tout en limitant la prise de poids… histoire d’obtenir des performances équivalentes, voire supérieures, à celle de la voiture d’origine. En revanche, il faudra, comme pour les voitures électriques modernes, accepter une autonomie inférieure à la version thermique… le sempiternel talon d’Achille des batteries !
Métamorphose technique
La Mercedes 450 SLC d’origine, un coupé 4 places doté d’un gros et lourd V8, se prête bien à l’exercice du Retrofit. La disparition de la mécanique, du réservoir, mais aussi des systèmes de refroidissement et d’échappement ont permis de libérer suffisamment d’espace pour y intégrer le nouveau moteur électrique, son électronique de puissance et le pack batterie (composé de modules LG identiques à ceux d’une Renault ZOE). En forme de disque, le très compact moteur électrique est légèrement plus puissant que le V8 d’origine et s’accouple à la boîte automatique 3 rapports d’origine qui a été conservée pour des raisons de coût. Le volumineux réservoir d’essence de 90 litres cède sa place à une partie du pack batterie alors que le reste prend place sous le capot moteur avec l’électronique de puissance. Cette disposition permet un équilibre pondéral presque parfait avec une répartition proche de 50/50. Le chargeur AC (courant alternatif) embarqué fait 7 kW (chargeur DC en option) et permet de recharger la batterie en +/- 7 h sur une borne domestique ou publique.
Sensations contrastées
Prendre les commandes de la SLCE dégage l’étrange sensation de voyager dans le temps surtout si, comme moi, vous avez connu l’époque pas très lointaine où la SLC originale était en production ! De fait, l’installation à bord rappelle à quel point les voitures anciennes étaient exiguës et presque rudimentaires… Que de progrès réalisés en si peu de temps ! Le démarrage du moteur et les premiers mètres parcourus continuent de surprendre à bien des égards. Le futurisme de la douce progression silencieuse dans un environnement vintage se mêle aux sensations des interfaces de conduite d’époque.
Le futurisme de la douce progression silencieuse dans un environnement vintage se mêle aux sensations des interfaces de conduite d’époque.
Je me laisse bercer par le moelleux des sièges qui se marie à la suspension souple ondulant sur les irrégularités de la route mais le flou de la direction me rappelle à l’ordre… Malgré cette cure de jouvence mécanique, c’est bien une « ancienne » que je dois « naviguer » dans la circulation ! Ce faisant je suis surpris par la nouvelle motorisation électrique dont la réactivité et la douceur remplacent avantageusement l’ancien V8. Son intégration et son interaction avec l’ancienne boîte auto me bluffent littéralement et je ne peux qu’applaudir Emobe pour cette réalisation étonnamment homogène et rigoureuse.
Solution d’avenir
Cet essai confirme qu’il sera techniquement possible de continuer à utiliser les old/youngtimer dans le futur puisque, au même titre qu’une voiture électrique moderne, l’accès aux zones basses émissions leur restera ouvert. Les sociétés comme Emobe sont nombreuses et il faudra être vigilant pour s’assurer de leurs compétences non seulement pour ce qui est de la réalisation du Retrofit mais aussi de leur homologation, chose que Emobe inclut dans ses prestations. Reste à savoir quelle somme il faut débourser pour avoir le plaisir de rouler dans un véhicule que l’on pourrait qualifier de rétro-futuriste… Une question à laquelle Emobe répond avec un tarif approchant actuellement les 50.000 €, véhicule non compris. Pas donné penserez-vous, mais c’est le prix à payer pour une réalisation « éco-vintage » à la carte !
Texte: ADPF / Photos: Diana Sellier